Le terme adjectif, par son étymologie latine, signifie « qui s’ajoute ». Il s’ajoute à un autre mot auquel il apporte une précision de sens. Il est donc inapte à être employé seul. La grammaire classe comme qualificatifs tous les adjectifs qui indiquent une qualité ou propriété essentielle ou accidentelle de l’objet désigné par le nom (ou le pronom) sur lequel ils portent. On réserve l’appellation d’adjectif à la seule catégorie de mots variables en genre et en nombre ; on oppose ainsi cette classe à l’ensemble des déterminants du nom : il faut étudier séparément les adjectifs « non-qualificatifs » (possessifs, indéfinis, démonstratifs, interrogatifs, numéraux) qui fonctionnent en réalité comme déterminants du nom.
Adjectifs qualificatifs et adjectifs relationnels
Comme le nom, l’adjectif est un mot dont la forme peut varier en genre et en nombre ; mais contrairement au nom, il ne possède pas par lui-même un genre. Les adjectifs dépendent d’un autre terme de la phrase, généralement nominal ou pronominal, et leur fonction se définit selon la manière dont ils sont mis en relation avec cet élément régisseur :
reliés à un terme recteur par l’intermédiaire d’un verbe, ils sont attributs du sujet ou attributs de l’objet :
Ce film est intéressant et Je trouve ce film intéressant.
comme modificateurs facultatifs à l’intérieur du groupe nominal, ils sont épithètes :
J’ai regardé un film intéressant.
lorsqu’ils se rapportent à un groupe nominal dont ils sont séparés par une pause et surtout par l’intonation (à l’écrit, par une virgule), ils sont dits apposés ou détachés :
Cette jeune fille, paresseuse depuis un an, va rater ses examens.
L’ensemble de ces propriétés syntaxiques définit la classe des adjectifs qualificatifs qui sont appelés ainsi parce qu’ils indiquent une caractéristique du terme auquel ils se rapportent. Les adjectifs qualificatifs varient en degré (si, très, plus, moins paresseuse). Ils ont régulièrement un correspondant nominal (paresseux / paresse, courageux / courage) et forment souvent la base d’un adverbe : courageusement, etc. Ils se pronominalisent par le invariable, mais peuvent être aussi repris par tel(s), telle(s) :
Elle a toujours été paresseuse et le restera ; Elle est paresseuse et est considérée comme telle par tous ses camarades.
Une classe d’adjectifs très productive ne s’emploie normalement qu’en fonction épithète : un couscours royal, une voiture diplomatique, un décret ministériel, etc. Ces adjectifs immédiatement postposés au nom sont dits relationnels parce qu’ils indiquent une relation (qui ne peut varier en degré : *un couscous très royal) avec le référent du nom dont ils sont dérivés. Cette relation dépend du sémantisme de leur nom recteur (un décret ministériel ‹—› un décret du ministère). Ils constituent dès lors l’équivalent syntaxique et sémantique d’un complément du nom ou d’une relative qui expliciterait cette relation : une voiture de diplomate, une voiture qui appartient à un diplomate.
Les classes morphosyntaxiques de l’adjectif
Les adjectifs à forme simple ou complexe
Les adjectifs à forme simple (bon, rapide, etc.) se réduisent à un radical morphologiquement inanalysable et sémantiquement opaque, auquel s’ajoutent directement les marques du genre et du nombre.
Les adjectifs à forme complexe sont construites par dérivation ou par composition : vert / verdâtre, sport / sportif, flatter / flatteur (suffixation) ; impur, immoral, maladroit (préfixation).
Les adjectifs composés, quant à eux, sont formés de deux adjectifs variables (sourd-muet, ivre-mort) ou d’un adjectif invariable à valeur adverbiale suivi d’un adjectif variable : nouveau-né, etc.
Les adjectifs par conversion
Certains éléments peuvent acquérir le statut d’adjectif qualificatif grâce au phénomène de dérivation impropre. Il peut s’agir d’adjectifs verbaux (brillant, amusant, méfiant), de participes passés (usé, vieilli), de noms réduits par métaphore à leur(s) propriété(s) : il est tarte, vache, etc. ; de noms employés indifféremment comme noms et adjectifs (il est joueur, menteur), d’expressions nominales (elle est vieille France, ce vin est bon marché). Il peut s’agir aussi d’expressions prépositionnelles dénotant une propriété ou un état : il est de bonne humeur, en colère, etc.
Les variations en genre et en nombre des adjectifs
L’adjectif s’accorde en genre et en nombre avec le nom auquel il se rapporte.
Les marques du genre
On forme le féminin en ajoutant un -e muet à la forme du masculin. Mais la forme du masculin peut subir d’autres modifications en passant au féminin : bon / bonne, léger / légère, etc. Certains adjectifs appelés épicènes ont une seule forme pour le masculin et le féminin : un récit véridique, une histoire véridique.
Les marques du nombre
Pour la formation du pluriel, les adjectifs suivent les mêmes règles que les noms. À l’écrit, on ajoute généralement à la forme du masculin ou du féminin singulier un -s pour former le pluriel. Quelques adjectifs ne suivent pas cette règle :
les adjectifs masculins en -eau prennent un -x au pluriel (beaux)
les adjectifs masculins en -al ont généralement un pluriel en -aux (brutaux, spéciaux)
les adjectifs de couleur issus de noms prennent ou non le -s selon leur degré d’adjectivisation
les adjectifs terminés au singulier par -s ou -x ne varient pas au pluriel (nerveux, doux).
Les degrés de signification des adjectifs qualificatifs
Intensité et comparaison
Les notions exprimées par les adjectifs qualificatifs sont généralement variables en degrés. Le français distingue deux échelles : soit la variation est considérée en elle-même (degrés d’intensité avec un peu, assez, très, trop, etc.), soit en rapport avec un autre élément (degrés de comparaison avec plus, moins, aussi... que, etc.). En emploi absolu, l’adjectif n’est pas marqué relativement au degré de la qualité qu’il dénote. Ce degré dit positif constitue en fait le degré zéro de l’évaluation des adjectifs. Certains adjectifs n’admettent pas la variation en degré : les adjectifs relationnels, les adjectifs exprimant une qualité non soumise à variation (carré, circulaire, etc.), les adjectifs dont le sens intègre déjà une notion d’intensité ou de comparaison (majeur, mineur, aîné, cadet, premier, dernier, etc.).
Les degrés d’intensité
intensité faible : minuscule, infime, etc., préfixation avec sous-, hypo-, etc.
intensité moyenne : elle est marquée par quelques adverbes (assez, moyennement), etc.
intensité élevée : c’est la plus fréquente. Elle est marquée par les adverbes (très, tout, fort, bien, tout à fait), les préfixes et les suffixes (archi-, extra-, hyper-, -issime, etc.), par le sens même des adjectifs (divin, absolu, excellent, etc.), etc.
Les degrés de comparaison
On distingue le comparatif et le superlatif relatif selon la manière dont le degré de l’adjectif est évalué par rapport à autre chose : au comparatif, la propriété est simplement mise en rapport avec un ou plusieurs éléments de référence (le thé est plus chaud que le café) ; au superlatif relatif, il y a également mise en rapport comparatif avec d’autres éléments présentant la même propriété mais le référent du nom qualifié par l’adjectif est présenté comme possédant soit le plus haut degré (le plus) soit le plus bas degré (le moins) de la propriété par rapport à l’ensemble des autres référents.
On distingue trois sortes de comparatif : supériorité (plus + adjectif), égalité (aussi antéposé à l’adjectif), infériorité (moins + adjectif).
Le groupe adjectival
Comme mot-tête d’un groupe adjectival, l’adjectif qualificatif peut être complété par différents types de modificateurs :
La modification par un adverbe
Les adjectifs qualificatifs peuvent être modifiés par des adverbes d’intensité qui spécifient le degré de la propriété dénotée ou qui modalisent le rapport de caractérisation entre l’adjectif et le nom (confer supra, § « Les degrés d’intensité »).
Les compléments prépositionnels
L’adjectif peut être complété par un groupe prépositionnel traditionnellement appelé complément de l’adjectif : apte à, enclin à, exempt de, etc.)
Les compléments propositionnels
Pour un grand nombre d’adjectifs, le groupe nominal introduit par la préposition peut être remplacé par une complétive : Je suis content de ce travail / que vous soyez là.
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N. B. : Cette page synthétise le chap. 8 de la Grammaire méthodique du français de M. Riegel, J.-C. Pellat et R. Rioul.